dimanche 26 avril 2015

Dans la ville d'or et d'argent - Kenizé Mourad

C'est en Inde que je me retrouve de nouveau. A Lucknow, plus précisément, ville que l'on dit d'or et d'argent pour son côté éclatant. Resplendissante, paisible et scintillante avant la mainmise des Anglais, elle devient le chef lieu de la résistance après leur arrivée. L'éviction du Roi ne peut en effet être supportée et la résistance est appelée à s'exprimer. La révolte des Cipayes donne le La. La musique peut s'engager. Les Indiens (une partie) commencent à crier le désespoir qui longtemps les a privés de voix. Le chant est violent. A coup de colère et de haine, ils ordonnent le retrait définitif des Anglais. Mais rien y fait. Ceux-là restent sourds aux volontés exprimées. Seulement, ils ne sont pas muets. Ils réagissent à leur tour avec violence et virulence. La révolte doit être écrasée. 

Ce roman raconte donc la première insurrection indienne, celle qui aboutira, on le sait, près d'un siècle plus tard à l'indépendance du pays. Menée en 1856 par la bégum Hazrat Mahal - quatrième épouse du Roi - la révolte lancée par la ville d'or et d'argent va en effet nourrir un mouvement qui, plus tard, mènera les Anglais à leurs pertes. Et dans ce livre malheureusement léger, l'auteure essaye de nous expliquer les conditions d'apparition de cette première révolte, sa réalisation et sa mise en échec; les intérêts particuliers des chefs l'ayant, comme toujours, emportés sur l'intérêt général voire même national. Ouvrant les portes de l'Histoire, Kénizé Mourad ne se prive pas de la petite histoire, celle de deux amoureux qui, ensemble, veulent obtenir l'Indépendance du pays; Hazrat Mahal tombant sous le charme de Jai Lal, son chef militaire courageux et particulièrement déterminé. 

Ce roman avait tout pour m'intéresser. L'Histoire de l'Inde continue effectivement de me passionner. Pourtant, je ne me suis pas vraiment régalée. L'auteure a fait, me semble-t-il, dans la simplicité. Je n'ai pas su plonger dans le tourbillon de l'Histoire. Je suis restée en surface. Aucune émotion, aucun intérêt. Lucknow s'est révoltée, les Indiens ont lutté. Ils se sont opposés et déchirés. Et après? Je n'ai vu aucune profondeur. Kénizé Mourad a comme une vue courte et simple. Elle écarte d'un revers de main la complexité et ses effets. Elle livre ses leçons sans aucune subtilité. La vision est même manichéenne. Ainsi, Lucknow était un paradis terrestre où la beauté s'alliait à la paix et la justice avant que les Anglais ne viennent la détruire et la déchirer. Le doute est-il permis? Dire que la colonisation est une abomination - merci, je me réjouis de l'entendre - mais prétendre au paradis terrestre et à l'organisation sociale indienne parfaite avant l'arrivée des colons anglais, voilà que je me pince le nez. C'est, pour moi, loin de la crédibilité. Quant à l'histoire d'amour entre notre courageuse Begum et son magnifique militaire, il faut dire qu'elle ne m'a pas non plus attirée. Je suis, là encore, restée dans la superficialité et la légèreté. Je n'y ai trouvé aucun plaisir, aucun intérêt.

Alors, non, ce roman n'est pas ennuyant. Il se lit mais sans enthousiasme ni passion. Il se lit avec une certaine déception. Sa lecture ne sera donc pas ici encouragée.

Dans la ville d'or et d'argent, Kenizé Mourad, Le Livre de Poche, 504p, 7.60€

samedi 18 avril 2015

7 jours à River Falls - Alexis Aubenque

De ma vie d'adulte, je n'ai lu qu'un thriller. Comprenez, je ne suis pas adepte de ce genre littéraire. La faute à ma fragilité. Froussarde, j'ai peur d'avoir peur. Je crains, en ouvrant un thriller, d'affecter mon imagination, de la polluer d'images et de scénarios effrayants. J'ai peur de rencontrer l'horreur et tout ce qui va avec: les malades mentaux du genre psychopathes, les tueurs en série, les violeurs, les meurtres ... Je n'apprécie pas la peur et le suspense qui va avec. Ma paranoïa déjà bien exacerbée n'en serait que davantage alimentée. Aussi, je m'en tiens bien écartée ...

D'où sort alors ce thriller ? Eh bien je me suis laissée convaincre par l'enthousiasme d'une jeune femme qui me voyant hésiter devant les livres offerts lors d'une promotion - le fameux deux livres achetés, un offert - m'a conseillé le roman d'Alexis Aubenque, me jurant qu'il ne faisait pas vraiment peur et qu'il était d'une excellente qualité. Pourquoi pas. 

Et elle a raison, ce thriller n'a rien pour faire peur. Les premières pages m'ont même particulièrement ennuyée. Dialogues inefficaces, personnages décevants, début d'enquête improbable. Plus que la peur, c'est le rire - celui de la dérision - qui se dessinait sur mon visage. Cependant, les pages filant, très rapidement, j'ai commencé à m'installer dans ce roman. Le personnage principal et sa dulcinée membre du FBI gagnaient au fur et à mesure ma sympathie, le rythme était lancé, je suivais avec attention l'enquête qui, il faut l'avouer, n'est pas très exaltante. Le suspense n'est pas. L'identité du coupable qui a torturé et assassiné les deux jeunes femmes trouvées au fond d'un lac nous est, sans soucis, révélée. Le lecteur ne fait, dès lors, que suivre les "péripéties" du shérif chargé de l'enquête. Suspense, s'il y a, il ne se présente qu'aux dernières pages du livre où l'on s'interroge sur le sort qui lui est réservé.

En bref, si je suis ravie de ne pas avoir connu la peur, sentiment que je ne cherche pas à éprouver, je suis quelque peu déçue de la qualité de ce roman qui n'est pas excellente comme on me l'avait signifié. Avis dès lors mitigé. 

7 jours à River Falls, Alexis Aubenque, Le Livre de Poche, 474p, 7.10€

 

jeudi 16 avril 2015

Marie Blanche - Jim Fergus

C'est pour son prix très bien soldé que j'ai acheté ce livre. Je n'avais, sinon, à son égard, ni intérêt ni curiosité. La Grande Librairie en avait parlé il y a quelques années mais rien ne m'en était resté. Je ne savais donc plus rien de son histoire et, tant mieux, la lecture fut une agréable découverte.

Agréable parce que j'ai pris un certain plaisir à rencontrer Marie-Blanche et sa mère Renée, respectivement mère et grand-mère de l'auteur. Les deux femmes sont des personnages qui méritent d'être racontés tant elles sont quelque peu déjantées. La grand-mère est une femme manipulatrice, froide, sans grande pitié. Sa fille, Marie-Blanche, est, quant à elle, fragile et un peu torturée. Différentes, elles ont tout de même quelques traits de caractère en commun. Toutes deux égoïstes et capricieuses, elles aiment être au centre de leur monde. Sans doute parce qu'elles sont membres d'une aristocratie française, ici, pas du tout épargnée? La noblesse est effectivement égratignée. On y trouve la lâcheté, l'hypocrisie, l'immoralité, la fainéantise, l'inceste et la pédophilie. On y trouve des maux connus de tous - familles et amis - qui sont loin d'être condamnés et qui m'ont parfois embarrassée. 

Ainsi je dois l'avouer, si ma rencontre avec l'ascendance de l'auteur s'est faite avec un certain plaisir, elle n'a pas suffit à emporter mon entière satisfaction. C'est personnel, je n'ai pas trop apprécié cette famille qui m'a mise mal à l'aise. Je n'ai pas, non plus, aimé certains passages qui manquaient cruellement de crédibilité. Ils tiraient inlassablement vers le bas la qualité de ce roman pour lequel mon avis est, vous l'aurez compris, mitigé.

Marie Blanche, Jim Fergus, Edition Cherche Midi, 606p, 22€

dimanche 12 avril 2015

Gândhî ou l'éveil des humiliés - Jacques Attali

Depuis des années, Gândhî - raconté par Jacques Attali - m'attend dans ma P.A.L. Il attendait patiemment que je découvre son histoire, moi qui l'avais acheté après avoir vu un film sur son nom. C'était l'époque où je m'intéressais à l'Inde, je ne sais comment expliquer ma curiosité pour ce pays. Le livre acquis, je ne l'ai pourtant pas ouvert ni visité. Il est resté fermé là sur les étagères de ma bibliothèque à attendre que je me décide. Et je me suis décidée. Je l'ai ouvert il y a maintenant deux semaines et point de regret, il a été d'une agréable compagnie. 

Dans ce livre, Jacques Attali nous raconte avec intérêt un peu - sinon beaucoup - Gândhî. Qui il était, comment il est devenu le personnage qu'on connait, quelles étaient ses idées, ses motivations, ses désirs et ses volontés. On apprend ses réussites et ses échecs; ses qualités et ses défauts. Et à travers son histoire, on découvre celle de l'Inde: son combat pour obtenir des Anglais son indépendance, les conditions de sa partition, les difficultés internes qui minent son avenir et devenir ... etc. 

Raconter l'Inde et Gândhî requièrent forcément du temps et de l'espace. Ce livre est donc long, très long. Mais sa longueur ne mine pas le lecteur. L'écriture, souple et facile, aide effectivement à retenir l'attention et l'intérêt. Cependant, il faut l'avouer: il y a des précisions et des détails qui ne servent à rien et ne font qu'allonger et alourdir inutilement le récit; défauts qui n'empêchent pas de tourner avec plaisir les pages de l'Histoire. A conseiller.

Gândhî ou l'éveil des humiliés, Jacques Attali, Le Livre de Poche, 600p, 7.50€

mercredi 1 avril 2015

Un long dimanche de fiançailles - Sébastien Japrisot

Je ne sais pourquoi j'ai longtemps hésité à acheter ce roman. En librairie, il m'attirait, je le consultais régulièrement mais rien y fait, je le déposais en rayon immédiatement. Et puis, finalement, je l'ai acquis. Avec plaisir je le dis, je ne regrette aucunement. Ce roman a été, en effet, lu avec délectation. Après quelques pages - marquées, je l'avoue, par la crainte d'une déception -  je me suis laissée emporter par cet amour fou qui motive notre personnage devenu émouvant. 

D'une détermination sans faille et d'un caractère trempé qui - parfois - peut être considéré comme le trait d'un caprice invétéré - Mathilde est une jeune femme amoureuse qui cherche la vérité sur ce qui a pu arriver à son Manech adoré. Il a été déclaré mort à la guerre mais elle n'y croit pas car ce qu'elle entend en 1919 ne la convainc pas. Que s'est-il passé en ce mois de janvier 1917 où son amour a été condamné pour avoir tenté de déserter en se blessant la main volontairement? Mathilde est persuadée que quelque chose lui est caché et qu'il convient de le déterrer. Dès lors, elle mène l'enquête avec obstination et acharnement. On l'observe et on s'interroge: ne perd-t-elle pas son temps à chercher ce qui n'a pas lieu d'exister? Ne devrait-elle pas accepter la tragique vérité? Son amour est mort, pourquoi insister? Et puis, le temps passant, on se laisse convaincre et on essaye, avec elle, de trouver la vérité. Captivant. 

Un long dimanche de fiançailles est un roman plus qu'intéressant. Il est émouvant, attendrissant. Il est aussi intelligent. Bien mené, bien construit, il raconte l'amour mais pas seulement. Il raconte également une guerre malheureuse et bien stupide; il raconte l'absurdité et la débilité des Hommes qui se battent - on ne sait plus pourquoi - la mort et sa tragédie excluant la raison et ce qui va avec la légitimation. 

Un long dimanche de fiançailles, Sébastien Japrisot, Collection Folio, 373p, 8€